Si j'avais un marteau...

Publié le par Zizanie

C’était ce matin (enfin hier matin, du coup).

Voilà trois jours que je n’ai rien mangé. Et le comble, c’est que je suis fière de moi. C’est terrifiant.
Voilà trois jours que j’enchaîne les nuits blanches. J’ai l’air d’un zombie. Je suis épuisée mais pas moyen de fermer l’œil.
Voilà trois jours que je carbure au café noir et à la Spiruline.
E
t voilà trois jours que je fais n’importe quoi. Je suis l’ombre de moi-même. Mais je suis rassurée. Pathétique mais rassurée. J’ai l’impression de tout contrôler et c’est jouissif.
Je sais bien que je suis dans le faux. Je sais bien que je suis en train de me détruire. Et je ne peux pas faire autrement.
Je ne crois plus en rien et surtout pas en moi. J’ai tellement grossi. Je me planque dans des pulls boulochés et informes, noirs évidemment, taille obèse. Je n’ai plus de goût. Je n’ai plus envie d’être jolie. Je ne le suis pas. Je rase les murs en gros pull et en rangeos.
Certes, je n’ai jamais été menue, je n’ai jamais porté en-dessous d’un 38. Mais ça m’allait parfaitement. J’étais jolie, séduisante, je plaisais. J’avais des formes là où il fallait. Aujourd’hui, je suis en mission cachalot.

En réalité, le problème n’est pas mon corps en lui-même mais la manière dont je le perçois. Je ne vois plus que mes bourrelets. Je ne vois plus que ces laides vergetures.
Excepté dans la partie anorexico-irrationnelle de mon cerveau, dans laquelle le squelette est canon de beauté, mon modèle est une pin-up. Une vraie femme, toute en rondeurs, avec une taille fine, une poitrine et des hanches généreuses. Ou une androgyne (à peine contradictoire, la Zizanie), ce que je ne pourrais jamais être vu les deux énormes bouées qui m’ont été greffées.

All around me are familiar faces
Worn out places, worn out faces
Bright and early for their daily races
Going nowhere, going nowhere
Their tears are filling up their glasses
No expression, no expression
Hide my head I want to drown my sorrow
No tomorrow, no tomorrow


Ma grand-mère m’a
appelée pour me dire qu’elle m’avait rêvée enceinte de trois mois. Il manquerait plus que ça ! Tu sais que je t’aime, Grand-Mère, parce que du coup, ma despote m’a téléphoné affolée, et ça m’a fait beaucoup rire. Ne t’inquiète pas, Maman, ça ne risque pas d’arriver. De toutes façons, pour toi, je suis toujours vierge, je suis toujours une petite fille, alors comment veux-tu que je me fasse engrosser ?

Et Ministal s’est invité, lui aussi, au bal des réjouissances téléphoniques. Il m’a demandé si, par hasard, j’avais quelque chose de prévu aujourd’hui. Il m’a proposé un pique-nique au bord du Canal Saint-Martin. Ce mec est jeté. J’adore. Seulement voilà, vu que je ne peux rien avaler, c’est un peu embêtant pour un pique-nique. Piscine alors ? Pour que j’exhibe ma graisse ? Ça va pas non. Et puis je n’aime pas l’eau. Je ne suis pas à l’aise.

Ronpschit Ernest Tigrette Topla Bijou Hamiral et Chapo !
Pischtron Gristi Douhami Joubi Minapash Danpa Hamtaro !
Hami ham-ham doubidou dodo
Tournesol krom krom Hamtaro !


Ministal : Qu’est-ce qui te ferait plaisir alors ? 
Zizanie : Te mettre la pâtée à Mortal Kombat !
(Mortal Kombat est aussi le jeu suprême de l’enfance de Ministal, et il a attendu son retour avec émotion)
Ministal : Vendu ! Tu veux que je vienne te chercher ?
Zizanie : Moi grande fille, moi pas peur, moi me débrouiller toute seule dans les couloirs de métro.


Un peu plus tard dans la journée soirée nuit (il est minuit passé).

J'étais partie pour un ciné avec des copines et me voilà chez lui au milieu de l’après-midi, avec un peu d’appréhension. Et après avoir inventé un bobard phénoménal auxdites copines (je les ai appelé avec une voix chevrotante pour leur raconter que j'étais clouée au lit, toute fièvreuse et tout, et tout). Désolée les filles, mais c'était un cas de force majeure : Mortal Kombat n'attend pas.

Ministal, l’œil lubrique : Donc on est d’accord, si je gagne, tu fais ce que je veux.
Zizanie : Tu n’as aucune chance. Je vais te neutraliser. Je suis docteur ès fatality. Et tu devras exécuter tous mes souhaits.
Ministal : J’ai hâte.

Et j’ai gagné. Je déteste perdre, alors je ne lui aurais pas fait ce plaisir, même pour flatter son ego de mâle. Il fut plus coriace que je ne le pensais, difficile à abattre le petit. Du coup, il s’est vexé et est parti bouder. Et pour le dérider, je n’ai rien trouvé de mieux que les chatouilles. Pente glissante, ma fille, très très glissante. Ben tiens, c’est bien pour ça que je l’ai fait.
Evidemment, il a voulu me rendre poliment mes chatouilles. Et malheureusement pour lui, je ne les crains pas. Alors il s’est vengé et m’a embrassé. Le sale bestiau.
Et pour une fois, je me suis laissée faire. Et c’était très agréable.
Ensuite, au lieu de me sauter dessus, Môssieur se lève et m’invite à danser. Ce mec est complètement jeté (épisode 2). J’ai trouvé un sacré concurrent à l’imprévisible que je suis.

Et si je ne racontais pas la suite ? Un peu de pudeur, nom de dieu !
Tu ne vas pas pouvoir t’en empêcher, petite bavarde. On parie ?
Tout ce que je peux vous dire, c’est que sa table n’est pas très confortable. En revanche, son matelas si. Et qu’en plus d’être jeté, il est très doué au Monopoly en apnée sous la couette. Il a réussi à me faire capituler.



Météo intérieure : Tropiques

Dans les oreilles : Gary Jules - Mad world

Sous les yeux : Le vide absolu


Publié dans Soliloques

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Z
Quatre heures plus tard.J'ai envie de pousser un coup de gueule, mais j'ai pas non plus envie d'écrire un article entier. Je le ferai peut-être demain.En attendant : Putain de bordel de sacrebleu de marin d'eau douce de scrogneugneu ! Le prochain qui me parle de Prête-moi ta main, je veillerai à lui arracher moi-même, et à la main et au couteau à beurre, chacun de ses organes !Voilà c'est dit, ce n'est pas pour ça que je me sens mieux. Loin de là. Mais au moins, j'ai emmerdé quelqu'un avec ça. Oui parfaitement, c'est toi, lecteur.Je dois avoir un régulateur de bonheur intérieur. Genre un thermostat qui me rappelle à l'ordre à chaque fois qu'une heureuse esquisse se présente. Ah non, grognasse, si tu crois que tu vas enfin pouvoir profiter de ton euphorie, tu te mets le doigt dans l'oeil, ma pauvre chérie. D'ailleurs, c'est toi qui te les crées toute seule, tes embrouilles.Non, c'est la faute à Charlotte Gainsbourg, d'abord.Et si jamais je te raconte pourquoi, lecteur, tu te diras forcément : "Tout ça pour ça ! "Mais ça je m'en tape, je m'en tape, je m'en tape.
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