Trompe la mort et tais-toi

Publié le par Zizanie

La machine de l’angoisse regagne peu à peu du terrain. Je suis une boule de nerfs. Je stresse. Je panique. Pour tout et n’importe quoi. Surtout n’importe quoi.

Mon ex-garant potentiel est un gros con. Tant pis, c’est l’occasion de voir le vrai fond des gens que tu pensais connaître. Au suivant.
Attention, je n’ai pas dit qu’il n’avait pas le droit de refuser. Mais sachant qu’il me connaît depuis ma naissance, et bien même. Qu’il connaît mes parents, très bien aussi. Qu’il n’a jamais eu de contentieux avec nous. Qu’il était supposé m’aimer beaucoup. Qui disait m’admirer. Bah, non. Et pour des raisons hallucinantes. Il m’a déçu. Je ne comprends pas. Tant pis.
En fait, c’est surtout que je me sentais déjà humiliée de lui faire la demande, moi qui n’aie besoin de rien ni personne. Et il m’a asséné le coup de massue.
Mouais. On va se débrouiller sans lui. J’étais un peu minée sur le coup, mais là, je suis remontée sur ressorts. Ah nan, je le veux, cet appart. Je ne vais pas lâcher au moindre obstacle.

Et puis, événement de la journée (oui, ma vie est à ce point vide pour le considérer comme tel), j’ai reçu un SMS de Ministal. Oui, c’était plutôt inattendu, vous en conviendrez. Une preuve de son imprévisibilité.
Rien de grandiose, hein. Mais quand même.
« J’espère que tu vas bien. Je t’embrasse. »
Je ne sais pas quand je vais lui répondre. Ni même si je vais lui répondre. Je ne saurais même pas quoi lui dire. J’ai calmé mes instincts impulsifs et j’ai rangé mon portable dans mon sac. Oui, parfois, il ne vaut mieux pas réfléchir.

On va poursuivre sur une note positive. Et surprise, je vais parler du boulot. Oui, je n’ai pas l’habitude d’en parler en termes très élogieux. Je pourrais, une fois de plus vous raconter combien mes gamins ont été insupportables et tordus. Je pourrais vous dire qu’un petit CP a traité de putes deux nanas de CM2. Oui, je pourrais. Je pourrais aussi vous parler d’une des nombreuses crises de nerfs d’une môme complètement jetée. Je pourrais vous décrire comment un des morveux a écrasé, volontairement, un petit moineau à moitié mort. Ou mort, je ne sais plus. Et qu’il est venu me prévenir qu’on voyait le cœur qui sortait. Burp. Qu’il est retourné jouer et qu’il est revenu me montré sa chaussure pleine de sang. J’ai failli lui gerber dessus. Mais non.

Au lieu de ça, je vous dirai à quel point je suis fière de moi, et pour une fois de mes collègues. Un des gamins qui, au début de l’année, piquait des crises tous les jours, qui partait frapper tout ce qui bougeait, qui beuglait. Qui m’a même tapé à plusieurs reprises (oui, oui, z’avez bien lu), qui menaçait de se couper la tête avec un couteau de la cantine. Qui cognait quand on osait le montrer du doigt. Et ben, ce gamin, auquel je m’étais néanmoins attachée, a fait d’énormes progrès. Ses crises de nerfs sont moins fréquentes. Beaucoup moins. Et surtout, il se calme bien plus rapidement. Alors qu’auparavant, une fois qu’il était dans son film, il n’écoutait plus rien. Il était impossible de lui parler.

Hier, deux apprenties pétasses s’amusaient à le chercher alors qu’il jouait tranquillement aux Kapla. Au bout d’un moment, je le vois bondir, un Kapla à la main, prêt à leur foncer dessus. Et avec la force qu’il a, il les aurait écrabouillées. Là, je l’appelle. Il me regarde. Et retourne jouer. Je vais le voir, lui demande de m’expliquer (j’avais bien vu la scène). Du coup, j’ai été faire leurs fêtes aux p’tites connes. Parce qu’elles font ça tout le temps.
Les efforts qu’il fait m’étonnent énormément. Comme quoi, rien n’est joué d’avance avec les minots. Tout n’est pas perdu. Ce n’est pas gagné, mais quand même.
D’autres également ont fait des progrès, mais les siens sont si flagrants qu’ils m’ont filé le sourire pour la journée et redonné confiance en mon boulot. Il m’en faut peu. C’est une petite victoire. Et c’est déjà ça.



Météo intérieure : Eclaircis

Dans les oreilles : Ella Fitzgerald - Fever

Sous les yeux : Le journal


Publié dans Soliloques

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