Documentaire animalier

Publié le par Zizanie

Envie de me laisser crever. Crise de boulimie. Gâteaux-fromage-mayonnaise-olives. Pour me retrouver deux doigts au fond de la gorge. Me purger à en saigner. Les ongles qui me griffent. Ou peu importe. Une manucure s’impose. Les larmes qui coulent. Faire défiler les photos. Prendre conscience de la loque que je suis devenue. Prendre conscience que je suis vraiment grosse. Que ce n’est plus un ou deux kilos en trop. Je suis toujours trop grosse. Prendre conscience que c’est par dizaine qu’il me faudra les perdre. Me dire que j’ai deux mois et demi pour retrouver forme humaine. Ou comment gagner un concours de pose de préservatif avec la bouche sur gode en plastique immonde grâce à ses réflexes vomitifs apprivoisés. Mon concurrent gay qui en arrive à vouloir virer de bord. Pour essayer. Si je fais fantasmer les gays maintenant, on est mal barré. Les boulimiques sont toutes des salopes, d’ailleurs, c’est bien connu.

Il faudra que je pense à retrouver mes boules Quiès au fond de mon sac. En prévision des feux d’artifice, tout ça. Le jour du quatorze juillet, je reste dans mon lit douillet. Je déteste les feux d’artifice. Ça fait du bruit. Et c’est moche surtout. Faudrait que j’investisse dans un casque antibruit. Tarabas m’a demandé si je voulais venir pour le bal des nations. J’ai décliné. Il y a gavé de (sors de ma tête, espèce de bordelais) (c’est pas comme si j’avais passé trois jours avec un bordelais à côté de mes oreilles) (c’est pas non plus comme si j’avais suffisamment de tics de langage comme ça) trop de monde. Trop de bruit. Je resterai enfermée chez moi. Schtroumpf grognon me propose de l’accompagner au bal des pompiers. Comment te dire, jeune padawan, que les pompiers, j’en ai ma claque ? C’est pas comme si Tarabas était pompier volontaire, hein. Non, c’est pas comme si. Tarabas m’a dit qu’il viendrait peut-être, du coup.

Si c’est pour me trainer au milieu de la foule, il va avoir du mal, le bougre. J’ai rien contre un feu d’artifice maison. Non, c’est pas bien de jouer avec des allumettes. Joyeux non-anniversaire. J’ai envie de voir personne. J’ai envie de le voir, lui. Envie d’autre chose que de me faire prendre sur l’esplanade de la BNF. Dis Tarabas, tu veux me non-épouser ? Pour qu’on puisse non-procréer, tout ça. Parce que je veux pas de non-enfants hors non-mariage. Manquerait plus que ça. Ma bonne dame. Et Tarabas, à notre non-mariage, je veux de la bière à volonté. On s’achètera un fût et on ira le descendre sur les quais. Et puis on ouvrira un squat dans lequel on vivra heureux et on n’aura pas d’enfants. Sauf que moi je ne veux pas de cafards, dans le squat. Et si on arrêter de faire des projets, hein ? Manquerait plus que je commence à flipper. J’ai pas envie de tout gâcher, cette fois. C’est ce que je vais faire. Comme à chaque fois. Mais pas tout de suite. Laisse-moi le temps de médire la grognasse que tu t’es tapé. C’était une pute, d’abord. Toutes des salopes. Comment va mon colocataire de tente ? Ben son futur cocard se porte à merveille. Tous des connards.

Oh oui, jurons-nous fidélité, tout ça. Elle n’était même pas belle, elle était même un peu conne, et d’ailleurs je n’ai plus le moindre souvenir de sa personne. La fidélité, tu parles. Je ne suis pas un chien. Engagement ? C’est un peu synonyme d’arnaque, non ? Rappelle-toi du forfait que tu voulais résilier. Et si tu remontais ton horloge biologique, hein ? Quoi, tu songes à devenir papa, un jour ? D’accord, pas de problème. Mais tu le portes toi-même. Manquerait plus que je me mette à pondre. Qu’est-ce qu’il se passe ? Oui d’accord, c’est un peu flippant de ne plus avoir de carte 12-25, tout ça, je compatis. C’est vrai, moi j’ai à peine dix-sept ans. J’ai toute la vie devant moi. Et de toute façon, quand j’atteindrai ton grand âge, je mourrai. Je serai déjà morte, d’ailleurs. La date de péremption, tout ça. On nait rock star ou on ne nait pas. Je t’ai déjà dit que je voulais finir vieille fille. On donnera des coups de canne aux enfants et aux pigeons et on passera le reste du temps à baiser. Où t’as vu des enfants dans l’histoire ? Ah si, pour les coups de canne. Mais non mon poumon, je ne parle pas des miens. Va falloir que tu trouve une mère porteuse pour tes gamins. Tarabas, je te jure que si tu me plaques parce que tu veux te reproduire, je t’émascule. Avec un couteau à beurre.

Il va falloir que Tarabas fasse taire ses questions existentielles. Ou y trouve des réponses. Parce qu’il commence à me faire flipper avec ses conneries. Je déteste les potes qui se rangent des voitures. Qui se mettent à procréer. C’est dégueulasse. On était bien, pourtant. A biberonner de la bière chaude, à brailler du Téléphone à la guitare sous un pont, entre deux flaques de pisse et quelques rats carnivores. Pour en arriver à brailler du Téléphone, on avait descendu tout ce qu’il y avait à biberonner. A se faire les abdos en enchainant les fous rires. Faut que jeunesse se passe, il parait. Désespérant. J’aime pas les enfants. J’aime pas les diners de couples. Foutue société secrète. Même quand t’es pas célibataire, tu te sens seule. Isolée. Pourquoi on devient fade quand on se case ? Pourquoi leurs centres d’intérêt deviennent sans intérêt ? Je ne veux pas grandir. Rengaine. Je ne veux pas grandir. C’est trop triste. Je ne veux pas grandir.




Météo intérieure : Ciel nuageux

Dans les oreilles : Maya Barsony - Calamity Jane

Sous les yeux : Un truc vachement intéressant sur De Vinci

Publié dans Soliloques

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