Péchés originels

Publié le par Zizanie

Pour ton information, lecteur, ceci est le trois-centième post de ce blog.


Constate à quel point je suis capable de psychoter pour rien. Ai l’esprit constamment préoccupé par ces putains d’anglais. Et d’autres trucs qui s’y sont greffés. Alors que j’ai n’ai aucune raison réelle de m’inquiéter pour ce qui m’inquiète. Tu suis toujours ? Evidemment, mon passif y est pour quelque chose. Je suis obsédée. Angoissée. J’ai envie de me foutre des claques. M’étonnerait pas que je somatise. Mais quand même. Ai les douleurs sans en voir la couleur. Bon, Zizanie, la prochaine fois que tu veux exercer ton sens de la poésie, tu t’abstiens. Le stress n’arrange pas les choses, j’ai encore plus mal au bide. Je pessimise. Et j’invente des verbes si je veux. Fais ce que je peux pour refouler. Tu crois que si je les menace avec un test de grossesse, ils vont rappliquer ? Un peu chère, la blague.

Névrosée, psychotique en puissance. Qui dit mieux ?
L’idée même d’approcher une blouse blanche me tétanise. Avec une mère hypocondriaque, ça n’étonne personne. Je ne vais jamais chez le médecin, même si j’agonise. Je n’ai même pas de médecin traitant. J’y vais à reculons quand j’ai besoin d’un certificat médical. Dans tous les autres cas de figure, je les évite comme la peste bubonique.
Pour que j’aille chez l’arracheuse de dents, il faut que la douleur soit réellement insupportable. Et j’ai un seuil de résistance à la douleur complètement décalé. Pour que j’aille chez l’ophtalmo, faut vraiment qu’il y ait urgence, genre un bout de bois qui me lacère la cornée pendant le montage des Solidays. Mais alors pour que je mette les pieds chez le foufounologue, il faut qu’on m’assomme, qu’on me drogue, qu’on m’attache et qu’on m’y traîne. Pire encore que pour que je prenne l’avion. Et je suis coriace, je me suis énormément entraînée pendant les évacuations de piquets de grève.

Je sais, je suis complètement inconsciente, tout ça. Je sais, c’est désagréable mais c’est pas la fin du monde. Sauf qu’on met la fin du monde où on peut. Où nos traumatismes nous permettent de les mettre. Mes raisons ne sont peut-être pas recevables, mais la démarche n’en est pas moins insurmontable. La dernière fois que je me suis fait violence pour y aller, j’ai fait une crise d’angoisse en entrant dans le cabinet. Je ne parvenais plus à respirer, j’étais totalement incontrôlable. Ils ont mis plus d’une heure à me calmer.
Je bloque. Il y a des événements qui nous marquent plus violemment que d’autres. Qui laissent des séquelles. D’énormes stigmates. C’est surtout que ça s’est passé à une période de ma (courte) vie où j’étais extrêmement vulnérable et en morceaux. Ça a finit de me réduire en miettes. Depuis, les années ont recouvert progressivement ces ruines. D’autres trucs se sont construits par-dessus. Mais les fondations sont instables et elles refont régulièrement surface. Ne tiens pas à jouer aux apprentis archéologues. Par peur de perdre toutes les ruses que mon inconscient a mis au point pour tenir jusque-là. C’est qu’il est fort, ce couillon. Tellement fort qu’il me fragilise.

Il y a des moments où j’ai l’impression de devenir folle. Où les remparts ne sont plus aussi efficaces. La folie me gagne. Je sais que je vais finir par péter un câble pour de bon. Et lancer une mode à base de camisole. Ça va être carrément tendance. Je dois être frustrée d’avoir du remiser mon keffieh au placard depuis qu’il est devenu l’accessoire indispensable des pouffes.
Eh oh, elle nous les brise, la petite occidentale qui mange à sa faim, qui a un toit sur la tête, qui n’a pas vu ses proches se faire égorger et qui ne s’endort pas bercée par le bruit des bombardements.
Je ne sais plus ce que je fais, je ne sais plus ce que j’ai envie de faire. Je suis carrément paumée. Il suffit d’une pierre défaillante pour que tout s’écroule. Vive le béton. La clef de voûte tient par je ne sais quel miracle tellement elle est fissurée. Faut que je trouve un architecte.
Le recrutement n’a pas encore porté ses fruits mais je m’y consacre avec application. J’y mets de la bonne volonté. Ah bon, les parties de jambes en l’air ne sont pas officiellement considérées comme des épreuves de recrutement ? Pourtant, il me semblait que. J’utilise le sexe comme la vodka : c’est un moyen d’oublier qui je suis. Vachement constructif de se faire sauter par n’importe qui. Des claques qui se perdent. Se recentrer ? Pourquoi ? J’en ai pas envie et j’en suis pas capable. C’est surtout que j’en ai pas envie.

A partir de demain, je jeûne. Puisque je ne suis pas capable de limiter les quantités de bouffe qui passent dans mon gosier − dans un sens, puis dans l’autre, je me mets en mode chameau. C’est ramadan surprise. Du liquide et seulement du liquide. Et un sucre dans mon sac. Tomber dans les pommes, ça fait négligé. Finir à l’hosto aussi.
Tarabas répète que je ne suis pas malade, que je n’ai juste aucune volonté. N’envisage même plus de lui faire comprendre un jour. Peut-être faudra-t-il que je crève dans mon vomi pour qu’il comprenne. Si je ne suis pas satisfaite de mon corps, je n’ai qu’à me mettre au sport, il a dit.

Bordel, une fois pour toute, l’anorexie et la boulimie sont des maladies mentales. C’est pas les mannequins squelettiques qui nous poussent à nous détruire. Le problème vient d’ailleurs, il est complexe, enfoui, et propre à chacun(e). Cette histoire de loi veut apporter une réponse à un faux problème. Elle incrimine les malades. Une anorexique qui se dit « pro-ana » est souvent dans le déni. Elle finir par prôner ce qu’elle nomme un mode de vie parce qu’elle ne peut pas faire autrement. Au bout d’un moment, il devient impossible de lutter contre ce monstre qui nous ronge. Bien sûr qu’on a envie que ça cesse mais l’idée est tellement flippante qu’on préfère décider de garder le contrôle. Une anorexique, une boulimique, même « pro-ana », « pro-mia », pro-ce que vous voulez, n’est pas heureuse. Sinon ce ne serait pas une maladie mentale. C’est quasi tout le temps associé à une dépression. Les TCA ne se soignent pas en mangeant normalement. Réapprendre à manger permet seulement d’éviter d’en mourir. Ce n’est pas la clef du succès. C’est juste la seule chose que les médecins sont capables de faire. Alors non, il ne faut pas laisser les « grands » créateurs dire que leurs mannequins ont un poids normal, ou encore que la mode est à la maigreur. Mais je trouve abominable l’idée de condamner des malades. Je ne suis pas pro-quoique ce soit, je sais juste de quoi je parle. En tout cas, plus que n’importe quel politicien lambda qui fait un condensé de ce que tel ou tel bien pensant lui a dit.

Ceci était donc le trois-centième article du blog. Billet-fleuve dans lequel je suis passée du coq à l’âne comme dans une partouze à la ferme. Pour changer. Le jour où je ferai un plan d’article, c’est qu’on aura usurpé l’identité de Zizanie.



Météo intérieure : Froid glacial

Dans les oreilles : The Rolling Stones - Jumpin' Jack Flash

Sous les yeux : Des cernes (trois heures de sommeil, cette nuit)

Publié dans Soliloques

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
G
Ben si quand même :o<br /> Je prend mes idées reçues de carabin pour rentrer à pleine puissance dans un point sensible, ça ne fait pas du bien la plupart du temps ;)
Répondre
Z
<br /> C'est toujours mieux que de garder ses idées reçues.<br /> <br /> <br />
G
Oui tu as été claire :D.<br /> Par contre tu mets tous(tes) les anorexiques dans le sac de l'anorexie mentale alors qu'il en existe d'autre non ?<br /> Pour ce que j'en sais, oui il y a une maladie mentale qui est dure, très dure, mais qui est vraiment spécifique mais il y a aussi des troubles sociaux qui on l'anorexie comme effet secondaire, des cancers, des depressions ... si une loi permet justement d'éviter que 2% des personnes qui seraient devenues anorexique ne le soient pas, c'est pas plus mal :)<br /> <br /> Sinon je vois que j'ai touché un point sensible :S<br /> Désolé.
Répondre
Z
<br /> Non, je ne parle que de l'anorexie mentale. La perte de l'appétit, c'est autre chose.<br /> Je pense que la loi toute seule ne servira à rien, même pour les 2%. En tout cas, elle ne répond pas au problème.<br /> <br /> Et oui, effectivement c'est un point sensible, mais il n'y a pas de raison d'être désolé.<br /> <br /> <br />
G
Bah les articles décousus ne sont pas un problème ... si ?<br /> <br /> Les problèmes d'anorexie .... je n'y connais rien. Oui j'ai étudié ça, je sais que c'est psychologique, un malaise mais je suis incapable d'imaginer ça .. hum interressant ce 300ème article. <br /> <br /> Au passage la loi qui vise "l'anorexie" vise surtout les magasines qui font que certaines filles minces sans être anorexique veulent à tout pris faire un régime, un régime, un rerégime pour perdre ce tout petit bourlet fait de muscle qui sera encore là quand il n'y aura plus aucun muscle sur leur corps. Oui c'est la pression sociale, la "mode" qui veut ça. Les filles veulent, je crois plaire à certains types d'homme et pensent sans doute qu'ils fantasment sur des mannequin alors qu'une femme sans forme .. enfin bref, encore une demonstration du gouffre qui sépare la psychologie féminine de la psychologie masculine non ?
Répondre
Z
<br /> Ben je dis justement le contraire dans mon article. Le nombre d'anorexiques qui le sont devenues à cause de la mode, des magazines, et des photos retouchées, en<br /> commençant un régime est minoritaire (voire carrément négligeable) par rapport aux vraies causes de l'anorexie. Une anorexique (qui n'est pas dans le déni, parce que c'est souvent le cas, toujours<br /> au début en tout cas) se rend bien compte qu'un corps squelettique est moche, ça ne l'empêche pas d'être attirée par la maigreur. C'est pour ça que je dis que c'est mental. La majorité des<br /> personnes qui deviennent anorexiques (ou boulimiques) le font sans en avoir conscience, et même si en apparence (dans ce qu'elles peuvent dire) c'est pour ressembler à des mannequins, il y a des<br /> causes bien plus profondes. Et comme la plupart des maladies mentales, c'est souvent du à un traumatisme (dans l'enfance, par exemple). Certains ont constaté que c'était souvent du à un problème<br /> dans la relation mère-fille. C'est une hypothèse et je ne serais pas aussi catégorique. Bref, tout ça pour dire que la loi apporte une réponse à un faux problème. Les magazines n'aident pas les<br /> malades, c'est certain (je ne dis pas qu'il ne faut rien faire pour). Mais ils ne sont pas la cause de l'anorexie. Et la loi vise également les sites dits "pro-anorexiques", et ça, c'est une<br /> aberration (c'est ce que j'ai expliqué dans l'article).<br /> Je ne sais pas si j'ai été très claire. Les TCA sont complètement obscurs pour ceux qui ne les vivent pas.<br /> <br /> <br />